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Publié le 12 septembre 2018
L’article 10 du projet de loi Alimentation, intitulé « pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous », autorise le Gouvernement à prendre par voie d’ordonnance, dans un délai de six mois, toute mesure relevant du domaine de la loi nécessaire pour modifier le titre IV du livre IV du code de commerce.

La Fédération du Commerce et Associé (FCA), qui représente les groupements de commerçants indépendants de plus de 30 secteurs du commerce de détail, essentiellement des PME de commerçants, se félicite de la volonté de clarifier et simplifier – enfin – le cadre législatif des relations commerciales qui constitue une véritable exception française.

Elle souhaite attirer l’attention du Gouvernement et du législateur sur le fait que le commerce est multiple ; les rapports de force entre distributeurs et fournisseurs sont à vents contraires selon les secteurs, selon les marchés ; toute réflexion, tout chantier engagé sur la modification du titre IV du livre IV du code de commerce doivent être réfléchis, pesés, en tenant compte de la diversité de ces acteurs.

Ainsi, la FCA propose deux modifications de l’article 10 :

  • Supprimer l’obligation envisagée pour le distributeur de formaliser par écrit les motifs de son refus d’acceptation des CGV
  • Préciser la possibilité de conserver la date de signature du 1er mars pour la signature de la convention annuelle

 

SUPPRIMER L’OBLIGATION DE FORMALISATION

  • Attention aux postulats simplistes

Le projet de loi ambitionne la mise en place de nouvelles règles pour équilibrer les relations économiques et commerciales entre entreprises.

La portée des textes modifiés serait générale en ce qu’ils visent tous les secteurs d’activité et non seulement le secteur de la distribution alimentaire.

Nous attirons alors l’attention sur le postulat simpliste qui considérerait qu’un fournisseur se trouverait systématiquement dans une situation où sa capacité de négociation se trouverait restreinte et mériterait une protection particulière.

Sans remettre bien entendu en cause le principe selon lequel les CGV demeurent le socle de la négociation commerciale, nous rappelons ce que nous observons de la réalité de la vie des affaires : dans tous les secteurs d’activité, y compris celui de la distribution alimentaire, les rapports de force fournisseur/distributeur peuvent tout à fait s’inverser.

Parmi les réseaux du Commerce Associé, nous citerons à titre non exhaustif les secteurs du textile de sport, de la parfumerie et de la photographie où les distributeurs indépendants ne sont pas en position de force face à certains grands fournisseurs d’envergure internationale.

  • Effets secondaires d’un formalisme excessif

L’article 10, I, 3° du projet de loi Alimentation autorise le Gouvernement à « préciser les dispositions relatives aux conditions générales de vente en imposant notamment la formalisation par écrit, par le distributeur, des motifs de son refus d’acceptation de celles-ci ».

Chaque opérateur économique, fournisseur ou distributeur, met en place ses propres processus de formalisation de la négociation en fonction de ses usages et de la relation de confiance qui existe parfois depuis de nombreuses années avec le client, avec le vendeur.

Créer un mécanisme homogène de formalisation risque de conduire à de nouvelles contraintes excessives et disproportionnées au regard des objectifs de protection poursuivis.

Les commerçants souhaitent se consacrer à leur métier, à l’amélioration du service client, à la conquête de parts de marché, plutôt qu’à la formalisation de leur processus opérationnel de négociation qui, généralement, ne soulève heureusement aucune difficulté.

Particulièrement au sein du Commerce Coopératif et Associé, les groupements de commerçants en charge de la négociation des achats et du des fournisseurs sont des structures de moyen, à fonctionnement optimal, qui ne disposeront pas des équipes et des ressources en capacité de répondre à un surcroît de formalisme encadrant leurs relations avec les fournisseurs.

Enfin, nous pressentons la création de nouvelles zones de contentieux au travers l’obligation d’indiquer les motifs de la dérogation apportée aux CGV initiales. Le fournisseur pourra-t-il se prévaloir de motifs illégitimes ? Insuffisants ? A quels titres ?

CONSERVER LA DATE DU 1ER MARS

L’article 10, I, 4°bis du projet de loi Alimentation autorise le Gouvernement à « modifier les dispositions relatives aux dates d’envoi des conditions générales de ventes et aux dates de signature des conventions mentionnées aux mêmes articles L. 441-7 et L. 441-7-1 ».

Au regard des précédentes tentatives de modification de la réglementation, nous rappelons une fois encore la réalité de la vie des affaires selon laquelle il est, pour de nombreux opérateurs économiques, impossible de fixer au 1er janvier la date limite de la négociation.

  • La négociation commerciale prend du temps

Les distributeurs attendent la communication - souvent après octobre/novembre - des CGV de milliers de fournisseurs avant de proposer la négociation d’un plan d’affaires reposant sur des conditions particulières de vente et des prestations de services individualisées avec chaque fournisseur.

Les négociations sont en principe longues et très rarement achevées au 31 décembre de l’année N-1 et les opérateurs attendent généralement l’atterrissage annuel du chiffre d’affaires N-1 avant de finaliser la négociation de l’année N.

Une fois les données de l’année précédente connues, un délai de traitement est requis pour intégrer ces chiffres dans une nouvelle négociation commerciale à combiner avec les évolutions de l’offre du fournisseur.

Le contrat est souvent relu et validé par les services juridiques du fournisseur et du client, ce qui rallonge davantage les délais.

Ces relectures entre services engendrent souvent quelques allers retours entre le fournisseur et le distributeur.

Le plan d’affaires (volumes, gammes, plan publi-promotionnel,…) est par ailleurs particulièrement complexe.

La durée nécessaire des négociations commerciales - en pratique d’octobre à février - s’explique par la quantité des fournisseurs et la complexité des marchés et familles de produits traités par le distributeur, par la profondeur, le détail et la qualité des plans d’affaires et des prestations de services qui sont négociés et formalisés avec chaque fournisseur.

La date butoir du 1er mars n’a pas été choisie au hasard par le législateur, mais afin d’intégrer ces temps de collecte puis de traitement des chiffres de l’année précédente, indispensables à la quantité et à la qualité des prestations négociées entre les parties.

La loi du 2 août 2005 qui a introduit le dispositif de la convention unique a élargi la durée de la négociation de deux semaines (auparavant le contrat devait être établi avant le 15 février), parce que l'appréhension plus globale des relations commerciales nécessite un délai de discussion supplémentaire.

  • La négociation commerciale ne peut être réalisée qu’à partir des données d’une année entière

Afin de pouvoir définir les nouvelles bases de la négociation, il est nécessaire de connaître les chiffres détaillés de l’année précédente relatifs aux ventes des produits du fournisseur.

Pour de nombreuses entreprises, cette prise de connaissance ne peut avoir lieu que quelques temps après la fin de l’année civile précédente, notamment de par la forte activité commerciale de décembre et la saisonnalité de certains secteurs sur cette période (jouets, sports…).

Les fins d’années civiles sont en effet réservées au budget ; les entreprises attendent les résultats consolidés de l’année précédente afin d’entamer de nouvelles négociations.

Il ne s’agit pas seulement d’un usage mais d’un impératif opérationnel.

N’oublions pas que des solutions ont déjà été trouvées pour encadrer cette période transitoire entre le 1er janvier et la date du nouvel accord.